Selon plusieurs organisations de défense des droits de l’homme, les conditions d’incarcérations en Tunisie sont “alarmantes”, ne répondant pas aux standards internationaux. En effet, l’état de santé des détenus est rudement mis à l’épreuve, notamment, du fait de la surpopulation (le taux de population carcérale avoisinerait les 170%). Les établissements pénitentiaires tunisiens ont, en effet, une capacité totale de 15 000 places et accueillent pourtant 26 000 personnes.
Pour répondre à ce problème majeur, une commission ministérielle s’est regroupé le mardi 19 janvier 2016 pour étudier les mesures possibles pour l’amélioration des conditions de détention et les moyens de palier à la surpopulation carcérale. Elle a également envisagé les possibilités de mise en places de processus efficaces de rééducation, de réhabilitation et d’intégration.
D’autre part, selon le Guide Pratique: Contrôle des lieux de détention en Tunisie par des organismes nationaux, publié par le DCAF (Centre pour le Contrôle Démocratique des Forces Armées) en collaboration avec le Ministère de la Justice, des Droits de l’Homme et de la Justice Transitionnelle, des engagements ont été pris dans le même sens. Il est donc envisagé de revoir la gouvernance concernant le système pénitentiaire pour que celui-ci soit plus efficace, responsable et “administré dans la plus grande transparence et le respect des lois et des droits humains”.
Ce guide fait état rapidement de la situation actuelle, et donne des recommandations sur les démarches à suivre lors des visites de contrôle pour assurer l’application et la pérennisation de la réglementation actuelle et future. Il a été créé dans le but de participer efficacement à un monitoring des lieux de détention, sans pour autant se substituer aux acteurs spécialisés. Il s’adresse à tous les acteurs tunisiens s’attachant à renforcer la bonne gouvernance dans le système pénitentiaire en Tunisie.
En premier lieu, il rappelle le rôle du ministère de la Justice, des Droits de l’Homme et de la Justice Transitionnelle. Ce dernier est notamment en charge de:
L’organisation et l’inspection des services publics judiciaires en veillant à leur bon fonctionnement, et d’entreprendre toutes les actions nécessaires à leur amélioration et à leur promotion
Le contrôle des activités des professions judiciaires et des auxiliaires de la justice
La présentation et le suivi de l’exécution de la politique portant sur les droits de l’homme
La contribution à la préservation des droits de l’homme et à la propagation de la culture de ces droits ainsi qu’à la garantie de leur exercice conformément à la législation nationale et internationale
Le développement d’un ensemble de stratégies pour traiter les atteintes aux droits de l’homme commises dans le passé, basées sur la recherche de la vérité, le jugement et la réconciliation conformément aux principes de justice transitionnelle adoptés au niveau national
Le contrôle des organismes placés sous sa tutelle dont notamment la Direction Générale des Prisons et de la Rééducation, le Centre d’Etudes Juridiques et Judiciaires, l’Institut Supérieur de la Magistrature et l’Institut Supérieur de la Profession d’Avocat
Il dresse ensuite une liste des mesures prises pour résoudre les problématiques liées au secteur pénitentiaire:
La reconnaissance du droit de tout détenu à un “traitement humain qui préserve se dignité” dans la nouvelle constitution adoptée le 27 janvier 2014
La consécration dans la nouvelle Constitution d’une vision du système de détention axée sur la “réhabilitation du détenu” et sa “réinsertion dans la société”
La ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en 2011, et l’adoption en décembre 2013 par l’assemblée nationale constituante d’une loi qui prévoit la mise en place d’une commission de prévention de la torture en Tunisie
La signature des accords entre le ministère de la Justice et des organisations de la société civile permettant à ces dernières d’effectuer des visites dans les prisons sous tutelle dudit ministère
Le guide pratique, avant d’expliquer les démarches à suivre lors de la visite d’un lieu de détention par des organismes nationaux donne un aperçu des réformes qui permettraient de concrétiser cette approche:
L’élaboration d’une nouvelle politique ou stratégie pénale ayant pour but la réhabilitation et la réinsertion sociale des détenus. Ceci nécessitera également la révision des sanctions et peines pour crimes et délits.
La réhabilitation de l’infrastructure des prisons et des postes de police pour garantir la conformité avec la nouvelle politique pénale. Ceci comporte d’une part la rénovation des lieux de détention existants pour assurer des conditions dignes pour les détenus. D’autre part, l’infrastructure doit également faciliter la mise en application des programmes de réhabilitation et de réinsertion sociale (par exemple par le développement d’institutions semi-ouvertes, etc.).
La formation des agents de l’administration pénitentiaire et des forces de sécurité intérieure sur les nouveaux standards et exigences dans le traitement des détenus et des conditions de détention.
La mise en place de mécanismes de contrôle (internes et externes) pour assurer le bon traitement des détenus et la prévention des abus.
Le contenu général du rapport porte ensuite sur la méthodologie à adopter lors d’une visite de contrôle et divisée en quatre parties: préparation de la visite, conduite de la visite, cas particuliers, rédaction du rapport. Il contient également un exemple de structure de rapport, une liste des prisons en Tunisie, une bibliographie des manuels et autres outils importants pour assurer un monitoring des lieux de détention.
Ce guide est la publication la plus récente en terme d’étude du système pénitentiaire tunisien, mais d’autres rapports ont été publiés au cours des dernières année, notamment par l’ Association pour la Prévention de la Torture. Les outils en place sont donc nombreux, et des dynamiques semblent se créer au sein du gouvernement. Nous pouvons donc espérer, dans les années à venir, un accroissement des réponses aux problématiques liées au milieu carcéral.
source: Babnet Tunisie, le 23/01/2016: “La surpopulation carcérale sur la selette”, http://www.babnet.net/cadredetail-119125.asp
Le Réseau Euro-méditerranéen des Droits de l’Homme/Euromed Droits félicite vivement l’Association Tunisienne des Femmes Démocrates (ATFD) pour la tenue de son XIème Congrès.
Le REMDH félicite également Mme Monia Ben Jmiaa qui vient d’être élue présidente de l’association ainsi que toutes les autres militantes membres du nouveau Bureau exécutif.
A cette occasion, le REMDH présente à Mme Saïda Rached ainsi qu’à toute son équipe sortante ses plus vifs remerciements pour le travail accompli par l’ATFD pendant son mandat.
Le REMDH continuera à accompagner l’ATFD dans sa lutte pour l’égalité en Tunisie et soutiendra l’association dans toutes ses autres actions de défense des droits humains.
Au cours de la semaine du 18 Janvier 2016, suite à un contrôle de police, un homosexuel tunisien aurait subi des violences physiques et été violé par un agent en uniforme, qui l’aurait ensuite menacé de représailles s’il ébruitait l’affaire ou s’il portait plainte, avant de l’abandonner dans les rues du quartier de Hammam-Lif. Les violences et l’agression sexuelle ont été confirmées par un examen médical.
Cette atteinte gravissime aux droits humains révèle de nouveau deux problèmes fondamentaux que connaît la Tunisie. Tout d’abord, bien qu’elle soit officiellement une “démocratie” naissante, la Tunisie a encore un long chemin à parcourir en matière d’application des droits de l’homme. C’est à croire que le pays a adhéré au “Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines et traitements cruels inhumains, ou dégradants” pour s’attirer les faveurs des pays occidentaux.
D’autre part, dans une situation sécuritaire instable, des droits supplémentaires sont accordés aux forces de police pour leur permettre d’assurer de manière efficace la protection des citoyens. Mais à l’inverse, on constate un harcèlement croissant et un abus des droits de la part des forces de police. Cela va sans rappeler que la situation est dangereusement précaire pour les minorités sexuelles, mais également pour de nombreux couple non-mariés et émancipés vivant ensemble ou ayant des relations sexuelles avant le mariage, sans parler des femmes, dont le statut est égal à celui de l’homme dans la constitution, mais qui subissent encore de nombreuses discriminations.
Il serait temps que les directives et priorités des forces de polices soient recentrées sur la protection des citoyens et non leur oppression et que les citoyens puissent faire valoir leurs droits sans peur des représailles. Des mécanismes de surveillance des policiers devraient également être mis en place pour, à l’avenir prévenir tout abus ou atteinte aux droits humains.
Les acteurs de la société civile, restent en tout cas, mobilisés pour veiller au respect des droits. C’est le cas du “Collectif pour les Libertés Individuelles”, force de plaidoyer récemment constituée, qui a notamment présenté, lors d’une conférence le 19 Janvier dernier, la situation des atteintes à l’encontre des libertés individuelles ainsi qu’une analyse de la constitutionnalité de certaines lois pour tenter d’expliquer la recrudescence récente des attaques contre les libertés, qui devient alarmante.
En dernier recours, il est bon de savoir que la Tunisie a adopté le “premier Protocole facultatif au Pacte international sur les droits civils et politiques” qui reconnait la compétence d’un Comité indépendant composé d’experts internationaux – le Comité des droits de l’Homme – à recevoir des plaintes de particuliers. Vous savez maintenant à qui vous adresser.
Suite aux graves évènements qui secouent actuellement le pays, les organisations de la société civile signataires déclarent ce qui suit :
Nous suivons avec beaucoup d’inquiétude le mouvement contestataire des demandeurs d’emploi qui a embrasé le Gouvernorat de Kasserine depuis le 17 Janvier et qui s’étend, depuis, à plusieurs autres régions du pays.
Nous exprimons notre déception par rapport à l’incapacité des différents Gouvernements, qui se sont succédés depuis 2011, à tracer une politique économique en phase et en cohérence avec les revendications à l’origine des soulèvements populaires qui traversent la Tunisie depuis 2008 et qui ont été à l’origine de la révolution de 2011.
Après une longue attente qui a duré 5 ans et surtout après les élections de 2014, la classe politique a montré son inertie devant des aspirations légitimes de dignité et de justice sociale. Prise par sa division, cette classe politique ainsi que les institutions de l’Etat, ont laissé la corruption se propager au détriment d’une économie saine qui prend en charge l’équilibre et la paix sociale.
En tant que défenseurs des droits humains y compris des droits économiques et sociaux, nous apportons tout notre soutien aux sans-emplois ainsi qu’aux jeunes en situation de précarité qui expriment leur mécontentement à travers des manifestations publiques et pacifiques.
Nous appelons les manifestants et les manifestantes à éviter toute forme de violence et à être vigilants par rapport à toute tentative de « récupération » du mouvement de contestation pacifique et légitime des sans-emploi par des parties externes dont le seul objectif est de déstabiliser le pays et de l’engager dans la voie de la violence et de la terreur.
Nous condamnons avec la plus grande fermeté tous les actes de violence, les attaques contre les forces de l’ordre, les actes de vandalisme visant les institutions et les biens tant publics que privés ainsi que les appels à la haine et à la destruction.
Enfin, nous appelons à l’adoption d’un modèle économique dont l’objectif est la réduction des disparités régionales et des inégalités sociales, notamment à travers la promulgation de lois et la mise en place de mécanismes garantissant la bonne gouvernance, une réelle démocratie participative locale et une décentralisation des pouvoirs et des structures socioéconomiques conformément à la nouvelle Constitution.
Liste des ONGs signataires :
Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH)
Forum Tunisien pour les Economiques et Sociaux(FTDES)
Association Tunisienne des Femmes Démocrates (ATFD)
Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT)
Association des Femmes Tunisiennes pour la Recherche sur le Développement (AFTURD)
Plateforme d’Economie Sociale et Solidaire (Platess)
Le Comité pour le Respect des Libertés et Droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT)
Union des Diplômés Chômeurs (UDC)
Vigilance pour la Démocratie et l’Etat Civil
Association Citoyenneté et Libertés
Association Amal du Bassin minier pour l’environnement
Association Thala Solidaire
Association TIGAR Kasserine
Association horizons el Kef pour le développement intégral
Association Tunisienne de la Défense du Droit à la Santé (ATDDS)
Association pour la Justice et l’égalité
Le groupe TAWHIDA Ben Cheikh
UTOPIA Tunisie
IRTIKAA
Free Sight
Association Tunisienne de Défense des Libertés Individuelles (ADLI)
Centre de Tunis pour la migration et l’asile (CETUMA)
Réseau Euro-méditerranéen des droits humains (EuroMed Droits)
Fédération Internationale des Droits de l’Homme (FIDH)
Oxfam
Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT)
Article 19
Association Tunisienne de Défense des Demandeurs d’Emploi (ATDDE)
Amal Kasserine
Younga Solidaire
Association de Développement Local de Borj Ennour (ADL Borj Ennour)
Création et Créativité de Développement et de l’Emploi (CCDE)
La ville de Kasserine vie depuis dimanche 17 janvier une ascendance des protestations des jeunes suites au décès du jeune Ridha Yahyaoui à cause d’un choc électrique après son suicide du haut d’un poteau d’électricité qui se trouve dans la place en face du gouvernorat de Kasserine pour protester sur la suppression de son nom d’une liste des nouveaux recrutés et des suspicions sur une manipulation de la liste de recrutement des diplômés chômeurs.
Le ministère de l’intérieur à décréter le couvre-feu hier soir dans le gouvernorat de Kasserine suite aux manifestations organisées par l’UDC.
Le Forum Tunisien pour les Droits Economiques et Sociaux rend hommage au défunt Ridha Yahyaoui et rappel son soutien au droit au travail revendiqué par les jeunes de la région et de toutes les autres régions marginalisées et exclues, ainsi que son soutien à leurs mouvements pacifiques pour défendre leurs droits et les droits de leurs régions au développement et la promotion sociale.
Le Forum rappel au gouvernement et à l’opinion publique ses demandes répétitives envers les autorités publiques pour trouver des solutions urgentes et sérieuses pour mettre fin à la souffrance des jeunes, des classes populaires et des habitant-e-s des régions de l’intérieure du pays, et il :
Alerte à nouveau du danger de continuer à ignorer les revendications des marginalisé-e-s et des pauvres 5 ans après la révolution de la liberté et de la dignité.
Déclare son refus du retour aux solutions sécuritaires qui ont prouvé leur échec durant le règne de l’ancien régime, et qui sont en désaccord avec l’Etat de droit et de la constitution de la deuxième république qui garantit le droit au travail, à l’éduction, à la santé et à la protestation pacifique.
Invite la coalition gouvernementale à adopter un programme de développement urgent pour les régions les plus pauvres et à mettre en œuvre des réformes fiscales audacieuses pour réduire l’injustice sociale et redistribuer plus équitablement la richesse.
Le forum appel toutes les composantes de la société civile et les forces politiques et sociales vers un front de salut qui adopte les revendications sociales légitimes pour un développement juste, lutter contre la corruption et concrétiser l’ensemble des principes et des droits stipulés par la constitution.
Après la révolution, une volonté claire est apparue du côté européen pour répondre à l’une des revendications clés de la société civile tunisienne, à savoir, la participation de cette dernière dans le suivi des affaires publiques, notamment des relations entre la Tunisie et l’Union Européenne, surtout suite au rôle primordial qu’elle a joué dans le processus de transition démocratique. Cette demande a rencontré une réponse graduelle de la part du Gouvernement Tunisien, réponse qui s’est notamment manifestée à travers les liens tissés dans le cadre du projet de mobilisation de la société civile dans le suivi des relations entre la Tunisie et l’Union Européenne lancé par le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme(REMDH) en janvier 2014. Le projet consiste en un dialogue tripartite rassemblant le Gouvernement Tunisien, l’Union Européenne et les composantes de la société civile et vise à faire participer activement la société civile dans le dialogue bilatéral.
Le projet est basé sur quatre thématiques principales traitées dans le cadre des relations entre l’Union Européenne et la Tunisie, à savoir :
Les droits des femmes et l’égalité hommes-femmes, la réforme du système judiciaire et la garantie de l’indépendance de la Justice, la mobilité et la défense des droits des migrants et des réfugiés, et le respect des droits économiques et sociaux à travers la mise en place d’un modèle de développement économique et social respectant les droits de l’Homme, réduisant le chômage – surtout dans les rangs de diplômés – , encourageant l’égalité des chances entre les personnes et luttant contre les disparités régionales.
Dans ce cadre, Rami Salhi, directeur du bureau Maghreb du REMDH, a déclaré que : « Ce projet vise à faire participer la société civile tunisienne dans le suivi des affaires politiques y compris les relations internationales qui lient la Tunisie à ses partenaires et surtout à l’Union Européenne et ses États membres. »
Il a souligné d’un autre coté que « le premier défi de ce projet consiste à créer une collaboration et une interaction entre la société civile et le Gouvernement, basée sur des propositions précises et réalistes qui prennent en compte l’ensemble des défis qu’affronte la Tunisie, avec la nécessité de respecter parfaitement les droits de l’Homme, les libertés, la souveraineté nationale et le droit des générations futures aux richesses du pays. »
Rami Salhi a ajouté que « ce projet a été initié afin de surmonter les défis relatifs à certains accords signés entre la Tunisie et l’Union Européenne et qui ne répondent pas aux principes fondamentaux des droits de l’Homme, tels que l’accord de partenariat de mobilité dont l’annonce politique a été signée en mars 2014 en l’absence des organisations de la société civile et qui comprend plusieurs violations des droits de l’Homme et surtout des droits des migrants et des réfugiés ». « Il s’agit en outre d’un accord ne garantissant pas la liberté de circulation et qui fait primer la protection de frontières européennes au détriment des intérêts des migrants, ce qui a entraîné plusieurs tragédies et catastrophes humanitaires et engendré des milliers de victimes et de disparus. Sans oublier les grandes difficultés que rencontrent les tunisiens pour l’obtention d’un visa et la sélectivité dont font preuve les États membres », a-t-il précisé.
Il a souligné que « l’accord, malgré ce qu’il a intégré d’éléments et de signaux impliquant une politique de développement visant à réduire le phénomène de disparités entre les régions ainsi que le chômage, demeure insuffisant et déséquilibré », soutenant que « la société civile, si elle est impliquée activement, est en mesure de modifier ces accords et de parvenir ainsi à une vision unifiée et convergente sur de nombreux points, surtout que le pays s’apprête à discuter un grand nombre d’accords importants où la vision de la société civile et ses propositions sont nécessaires, tels que l’accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA) dont les négociations démarreront en juin 2015. »
Synthèse des recommandations: « mobilisation de la société civile dans le suivi des relations entre la Tunisie et l’Union européenne »
Synthèse des recommandations des groupes de travail du projet « mobilisation de la société civile dans le suivi des relations entre la Tunisie et l’Union européenne » mis en place par le Réseau Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme (REMDH), en partenariat avec l’Union européenne (UE), en vue de la mission de plaidoyer sur la situation des droits de l’Homme en Tunisie. – Bruxelles, 22-24 juin 2015
La présente mission de plaidoyer est entreprise dans le cadre de l’aboutissement du projet « mobilisation de la société civile dans le suivi des relations entre la Tunisie et l’Union européenne » (projet Tunisie-UE), mis en place par le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme en partenariat avec l’Union européenne. Ce document vise à présenter les recommandations et positions exprimées par les organisations de la société civile membres des 4 groupes de travail thématiques tout au long de ces 18 mois (janvier 2014-juin 2015).
Concernant l’implication de la société civile dans le dialogue UE-Société civile, la délégation appelle l’UE à :
Mettre en place des mécanismes et des procédures permettant à la société civile d’accéder à l’information pertinente dans des délais lui permettant de réagir à temps ainsi que d’être pleinement associée dans la discussion sur les questions stratégiques relatives à la pérennisation du processus démocratique et au développement inclusif du pays;
Mettre en place des mécanismes permettant à la société civile de suivre le financement alloué par l’UE à la Tunisie ainsi que l’usage qui en est réellement fait ;
Impliquer la société civile dans la planification et l’évaluation des projets mis en place par l’UE en Tunisie ;
Assurer que la révision de la Politique Européenne de Voisinage, actuellement en préparation, prenne réellement en considération les besoins spécifiques du pays et soit fondée sur le respect des droits humains en privilégiant les intérêts communs, y compris en ce qui concerne la dimension sécuritaire.
Concernant la garantie d’une égalité de genre et la lutte contre toutes les formes de discrimination et de violences à l’égard des femmes en Tunisie, la délégation de la société civile appelle l’UE, dans ses relations bilatérales avec la Tunisie, à encourager cette dernière à :
Adopter la loi intégrale contre la violence à l’égard des femmes et des filles et effectuer les réformes législatives en conséquence ;
Ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) ;
Lever la réserve sur déclaration générale de la Tunisie relative à la Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) ;
Inclure la dimension genre dans l’élaboration des lois, des budgets de l’Etat et des plans de développement ;
Ratifier les conventions de l’Organisation internationale du travail, en particulier la Convention 183 et les conventions relatives aux droits économiques et sociaux des femmes pour garantir l’égalité de rémunération et combattre le chômage des femmes ;
Garantir la parité horizontale et verticale dans la loi électorale relative aux élections municipales et veiller à une représentativité équitable des hommes et des femmes dans les postes de décision.
Sur la question de la protection des droits des migrants et la politique migratoire européenne, les représentants de la société civile tunisienne appellent l’UE à :
Respecter les droits humains des personnes migrantes, réfugiées et demandeuses d’asile dans la politique migratoire de l’UE et dans la coopération avec la Tunisie. En ce qui concerne la coopération avec la Tunisie, encourager l’adoption et la mise en oeuvre de textes législatifs tunisiens en pleine conformité avec les conventions internationales. Plus précisément, encourager la Tunisie à ;
– supprimer les sanctions prévues en cas d’entrée, de séjour ou de sortie non autorisés et abroger la loi du 3 février 2004 ;
– adopter des lois sur les migrations en conformité avec les traités internationaux ratifiés par la Tunisie et lutter contre toutes les formes de discrimination, de racisme et d’exclusion à l’égard des populations migrantes en Tunisie ;
– ratifier les conventions de l’Organisation internationale du travail n°97 et n°143 relatives aux travailleurs migrants et la convention des Nations Unies sur la protection des migrants et des membres de leur famille ;
– mettre en place un système d’asile effectif basé sur le respect des droits humains et l’application du principe de non-refoulement ;
– mettre rapidement en place le conseil supérieur des tunisiens à l’étranger et renforcer la consultation de la société civile sur les questions migratoires et la protection des droits des travailleurs migrants ainsi que sur le partenariat pour la mobilité.
Exclure la clause de réadmission de tous les partenariats et accords signés avec la Tunisie ;
Assurer, dans le cadre des conventions bilatérales et du Partenariat de Mobilité, une liberté de circulation réelle et effective pour les ressortissants tunisiens en offrant une facilitation d’octroi de visa accessible à toutes et à tous et non pas seulement aux personnes hautement qualifiées ;
Lutter contre la traite des migrants en assurant des conditions d’accès à l’emploi digne pour toutes et tous, en ne pénalisant pas les victimes de trafic qui seraient en séjour irrégulier, et en permettant aux victimes de trafic d’obtenir réparation pour la violation de leurs droits (soutien médico-social ; accès effectif à la justice ; condamnation des trafiquants). Travailler au démantèlement des réseaux de recrutement illicites ;
Renforcer la coopération entre les acteurs de la société civile en Tunisie pour la défense des droits des personnes migrantes tunisiennes et notamment via la coopération syndicale.
En ce qui concerne les droits économiques et sociaux, les membres de la délégation appellent l’UE à adopter les orientations suivantes :
Orienter l’aide de l’UE vers les besoins nationaux et non pas plier les stratégies nationales des pays partenaires en fonction des fonds existants ;
Adopter des solutions concrètes, communes avec les Etats membres de l’UE, pour alléger l’endettement actuel de la Tunisie qui pénalise la transition démocratique en cours ;
Encourager la Tunisie à assurer la sécurité alimentaire, une meilleure autonomie énergétique et une meilleure gestion de l’eau. Appuyer dans ce sens la coopération technique et scientifique dans le domaine des énergies renouvelables et de l’économie sociale et solidaire ;
Eviter les conditionnalités qui entrainent l’adoption de réformes et de politiques d’austérité défavorables aux droits économiques et sociaux des citoyens et citoyennes en Tunisie ;
Plus spécifiquement, concernant l’ALECA :
– Envisager l’ALECA dans un cadre de coopération plus équitable (asymétrique en faveur de la Tunisie). En effet, et puisqu’il s’agit d’un accord entre pays ayant des niveaux très différents, l’équité des échanges doit être assurée ;
– Assurer la transparence de l’information dans les négociations de l’ALECA, permettre à la société civile d’accéder à l’information concernant les discussions en cours et mettre en place des échanges tripartites ;
– Ne pas remettre en question la protection de l’Etat tunisien concernant le secteur agricole tant que la Politique agricole commune (PAC) existe ;
– Assortir la liberté de circulation des biens, des services et des capitaux de la libre circulation des personnes.
Pour accompagner un processus de réforme de la Justice respectueux des droits humains et des principes fondamentaux d’un Etat de droit, la délégation appelle l’UE, dans ses relations bilatérales avec la Tunisie, à encourager cette dernière à :
Assurer un processus de réforme de la Justice transparent et participatif, reconnaissant la nécessité et l’importance d’impliquer la société civile tunisienne en tant qu’acteur concret dudit processus ;
Informer et sensibiliser les citoyennes et citoyens quant à leurs droits, plus précisément :
– En garantissant un accès facile et complet à l’information juridique ;
– En garantissant un accès facile à l’aide juridictionnelle et en particulier pour les groupes les plus vulnérables ;
Renforcer la capacité des magistrats et des avocats en matière de déontologie pour assurer leur indépendance, leur impartialité et leur intégrité dans le respect de la Constitution tunisienne et des conventions internationales ratifiées par la Tunisie ;
Assurer une justice de proximité en décentralisant la justice administrative et en réformant la carte judiciaire ;
Amender la loi sur la justice transitionnelle pour assurer sa conformité avec la nouvelle Constitution et les standards internationaux dans le but d’assurer l’aboutissement du processus et de lutter contre la politisation de ce dernier, notamment :
– revoir le nombre et la répartition des chambres spécialisées au sein des tribunaux de première instance ;
– assurer le respect du droit au double degré de juridiction par la création de chambres spécialisées au sein des Cour d’appel.
Assurer à la société civile tunisienne un meilleur accès à l’information et l’impliquer dans le suivi des activités de l’Instance Vérité et Dignité dans le but que la société civile puisse assurer un monitoring citoyen ;
Clarifier les textes de loi relatifs aux archives pour assurer un accès et une utilisation encadrés et pertinents, conformément aux nécessités de la justice transitionnelle.
Introduisant la micro-finance en Tunisie en 1995, Enda inter-arabe a reçu l’autorisation, le 31 décembre 2015 de lancer officiellement sa société de micro-finance intitulé “Enda Tamweel“. Des fonds seront pourvus par des actionnaires internationaux et nationaux pour permettre au projet de disposer d’un maximum de ressources, Enda Inter-arabe restant toutefois l’actionnaire principale. Plus d’un million et demi de micro-entrepreneurs pourraient ainsi bénéficier de crédits d’ici 2020 allant jusqu’à 20 000 dinars, somme rendue possible par la loi sur la micro-finance adoptée en 2011. Parmi les cibles envisagées, le projet vise notamment les femmes et les jeunes micro-entrepreneurs.
Les 78 agences de l’ONG, employant environ 1300 personnes, dont principalement des jeunes comptent un total d’environ 300 millions de dinars, actuellement en cours d’utilisation pour environ 270 000 porteurs de projets.
Divers produits financiers
La prestation de micro-assurances, transferts et paiement par mobile seraient envisagés, selon Michael Cracknell, co-fondateur d’Enda. En parallèle, l’ONG continuera d’offrir des services non financiers: des formations pour améliorer les capacités entrepreneuriales et managériales des micro-entrepreneurs, l’appui à la commercialisation notamment pour les artisans et les producteurs agricoles, des conseils et de l’accompagnement à la création d’entreprise ainsi que de l’éducation financière et citoyenne.
Un grand nombre de micro-entreprises ont vu le jour et se sont développées grâce au travail d’Enda. Ce sont en effet plus de 2 millions de micro-crédits, pour une valeur de 1,9 milliards de dinars qui ont été versés depuis le lancement de l’ONG sur le territoire tunisien. Au total, 600 000 tunisiens, dont 70% de femmes et 35% de jeunes ont pu bénéficier des services d’Enda. Aujourd’hui, grâce à son développement, le projet pourra bénéficier à un nombre plus large d’acteurs économiques, notamment les “start-ups” des jeunes sur l’ensemble du territoire, favorisant ainsi l’accès à l’emploi. L’objectif est aujourd’hui d’avoir “un impact direct et indirect sur l’amélioration des conditions de vie d’environ un million de tunisiens parmi les plus défavorisés.
Visitez le site officiel d’Enda Inter-Arabe pour en savoir plus.
L’association “Fani Raghman Ani” a inauguré, le vendredi et samedi 18 et 19 Décembre , en présence de représentants de l’ambassade d’Allemagne à Tunis et quelques cadres partenaires des Ministères de l’Education et de la Culture ainsi que des représentants de la société civile, des journalistes et des artistes, la salle de théâtre et de cinéma du collège Ibn Rachik de Dowar Hicher qu’elle a construite dans le cadre du projet «Nous sommes ici /na7nou Houna » .
” Nous sommes ici” est un nouveau projet de l’association “ Fani Raghman Ani” en partenariat avec l’ambassade d’Allemagne et le ministère de l’éducation, et qui consiste en la construction de salles de cinéma et de théâtre au sein des établissements d’enseignement primaire, de base et secondaire et ce dans l’objectif de participer à la diffusion et la généralisation des activités culturelles, surtout dans les zones marginalisées souffrant d’un manque cruel d’activités culturelles.
” Nous sommes ici” à Dowar Hicher est une initiative pour lutter contre la violence et l’extrémisme, surtout que cette région est privée de toute action culturelle. Cette région qui a souffert des éclaboussures de certaines affaires liées au terrorisme reste une zone peuplée par des enfants artistes et passionnés par tous les arts. les enfants de Dowar Hicher manquent seulement d’un espace qui leur permet d’exprimer leur talent , qui les protège du danger de la récupération terroriste. cet espace prévu pour les spectacles et représentations est une initiative qui donne l’occasion aux élèves du collège Ibn rachik d’être créatifs ce qui coïncide avec la décision du ministre de l’éducation de rendre obligatoire les clubs culturels dans tous les établissements scolaires.
Du 11 au 13 Décembre se sont réunies plus de 100 associations nationales et internationales lors du Symposium de la Société Civile. Cet événement avait pour intitulé “Les synergies entre ONGs Nationales et Internationales : Défis et Perspectives”. Les acteurs présents, répartis en quatre groupes (en respectant des critères de représentativité: région, genre, thématique, type d’ONG), ont travaillé au cours des trois jours sur les thématiques suivantes:
Bilan de la collaboration entre les organisations locales, nationale et internationales durant les dernières années
Clarifier les mandats et les attentes des diverses composantes de la société civile
Discuter du cadre juridique des associations à l’éclairage des contraintes pratiques (loi des associations, acquis et lacunes, et perspectives de réforme)
La refonte entre ONGs nationales et internationales (relations entre ONGs, bailleurs et structures d’appui technique : défis, perspectives, redevabilité, transparence…)
Discuter de l’appui financier
Discuter de l’appui technique
Priorités d’intervention de la Société Civile en terme de démarche, méthodologie et gouvernance
Charte éthique de collaboration et réflexion sur les études en perspectives
Ces ateliers ont donné lieu à une charte approuvée par les acteurs présents.
La corruption est un phénomène social, politique et économique complexe, qui touche tous les pays. Elle sape les institutions démocratiques, ralentit le développement économique et contribue à l’instabilité gouvernementale.
Le 31 octobre 2003, l’Assemblée générale a adopté la Convention des Nations Unies contre la corruption (résolution 58/4), et a prié le Secrétaire général de charger l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) d’assurer le secrétariat de la Conférence des États Parties à la Convention.
Le 9 décembre a été déclaré Journée internationale de lutte contre la corruption, afin de sensibiliser le monde à ce problème et pour faire connaître le rôle de la Convention, en matière de lutte et de prévention.
En 2014, l’Office des Nations Unies pour le Développement ( PNUD) et l’Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime ( ONUDC) ont développé une campagne globale conjointe, soulignant l’impact de la corruption sur l’éducation, la santé, la démocratie, la prospérité et le développement.
La campagne internationale conjointe de 2015 se concentre sur la façon dont la corruption sape la démocratie et la primauté du droit, entraîne des violations des droits de l’homme, fausse les marchés, érode la qualité de vie et permet la criminalité organisée, le terrorisme et d’autres menaces à la sécurité humaine de s’épanouir.
La campagne sur les réseau sociaux #breakthechain souligne également que la corruption est un crime transversal qui touche de nombreux domaines. Elle montre que les actions contre la corruption sont essentielles en vue d’atteindre les objectifs de développement durable, qui visent à mettre fin à la pauvreté, à protéger la planète, et à assurer la prospérité de tous.
En Tunisie, la corruption est un fléau pour l’économie tunisienne. si tout le monde s’accorde à le dire, l’action peine à suivre. En effet, d’après l’organisation anti-corruption Transparency International et sa 20ème édition de l’Indice de perceptions de la corruption, qui mesure le niveau de corruption dans le secteur public, la Tunisie figure à la 79ème place avec une note de 40 sur 100, alors qu’en 2013, elle avait obtenu une note de 41.
L’Association tunisienne des contrôleurs publiques s’est également intéressée à ce fléau en publiant en avril 2015 une étude qui démontre qu’au moins 450 millions de dinars (plus de 200 millions d’euros) ont été distribués en 2013 sous forme de pots-de-vin à des fonctionnaires.
En outre, si l’implication de responsables a été prouvée, documents à l’appui, certains ont été promus et non punis, s’indigne le président de l’association, Sharfeddine Yakhoubi.
La corruption ne touche pas que l’économie Tunisienne. Toujours selon le rapport the world justice project réalisé par transparency International d’autres secteurs seraient touchés :
S’il est convenu que la corruption augmente dans les périodes de post-conflit ou post-révolution , il semblerait que le gouvernement ait beaucoup de mal à gérer la situation, le confirme la démission du ministre tunisien chargé des relations avec le Parlement, Lazhar Akremi qui a clairement déclaré à l’AFP : “Je ne peux plus faire partie d’un gouvernement qui n’a pas la volonté politique de faire face à la corruption”.