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Terrorisme et Radicalisation, quel positionnement pour la Société Civile?

10 mars 2016

Terrorisme et Radicalisation, quel positionnement pour la Société Civile?

Dans le cadre du Jamaity Meeting du 04 mars 2016, plusieurs acteurs de la société civile ont été conviés par Jamaity pour débattre du positionnement de la société civile face au terrorisme et à la radicalisation en Tunisie. Cette rencontre s’inscrit dans un contexte de montée constante de la radicalisation et de l’extrémisme violent qui, on l’a encore constaté avec effroi ce lundi 07 mars, est une problématique plus qu’urgente.
Étaient présentes lors de cette rencontre les associations suivantes: Association DHIAA, MASSAR, SHAMS, Association Tunisienne de Soutien aux Minorités, Association Dom Polski, Association Manouba pour les Monuments et la Culture, Association de Sauvetage des Tunisiens Bloqués à l’Etranger, Association Jeunes Artistes, La Troupe Théâtrale de la Chebba, ADAM for Equality and Development, Findme .

La piste principale de débat concernait la position que devrait adopter la société civile pour lutter efficacement et prévenir au mieux la radicalisation. Une série de constats et de recommandations a émané de ce débat.

Les constats, tout d’abord peuvent être classés en deux catégories. Les intervenants ont tout d’abord relevé des données factuelles liées à la radicalisation et au terrorisme. D’un autre côté, ils ont aussi procédé à une recherche des causes de cette radicalisation et à une auto-critique de la société civile pour, enfin, expliquer les erreurs qui ont empêchées de stopper la montée de la radicalisation.

 

Constat:

 Données factuelles:

  • Selon le ministère de l’intérieur:
    • 5500 tunisiens environ combattent aux côtés de Daech
    • 800 y ont perdu la vie
    • 12 000 personnes ont été arrêtées en tentant de rejoindre Daech
    • 1000 personnes sont dans les prisons pour acte, ou préparation d’acte terroriste
  • Il existe trois niveaux de radicalisation (D’après les études psychologiques, les deux premières catégories peuvent revenir à la raison et recevoir un suivi psychologique efficace, mais n’en bénéficient malheureusement que très rarement):
  • Les personnes en phase d’endoctrinement
  • Les personnes déjà endoctrinées
  • Les personnes étant passées à l’acte de tuer
  • Selon les statistiques (Association RATTA), les principales cibles pour la radicalisation sont les jeunes entre 18 et 35 ans, surtout issus du Sud-Est, avec un profil scientifique
  • Le terrorisme et l’influence de l’islam radical et violent se retrouve de plus en plus dans la société tunisienne
  • Une grande partie de la radicalisation se fait en prison
  • Les personnes étant rentrées en Tunisie après avoir combattu dans les rangs de Daech, même celles s’étant enfuies, sont presque systématiquement mises en prison sans étude préalable au cas par cas
  • La société civile n’a pas le droit d’entrer en contact avec les prisonniers
  • Trop peu d’organismes tunisiens travaillent sur la radicalisation sur internet

 Causes:

  • La société civile, malgré l’augmentation des attaques sur le territoire tunisien, n’a que peu réagi et jamais d’une voix commune. Elle a échoué pour ce qui est de la coordination et n’a pas su se présenter comme une alternative crédible contre le terrorisme.
  • Les lois trop répressives en Tunisie sont la cause d’une grande partie de la radicalisation, car elles mettent un grand nombre de personnes en prison. Il s’agit notamment des lois visant les minorités (concubinage sous l’appellation “atteinte aux bonnes mœurs”, homosexualité etc.) ou concernant des délits mineurs (consommation et détention de cannabis etc.)

 

Recommandations:

Suite à ces constats, les participants se sont penchés sur les mesures à adopter pour commencer à lutter efficacement contre ces phénomènes. Une série de recommandations a donc été établie. Nous pouvons les classer de la manière suivante: Celles qui portent sur la prévention de la radicalisation, celles qui portent sur le travail post-radicalisation (aspect curatif), celles qui portent sur le travail que devrait effectuer la société civile pour gagner en efficacité.

 Sur la question de prévention:

  • Inclure les familles et l’entourage lorsqu’un travail sur la sensibilisation est effectué
  • Effectuer des recherches sur quelle approche adopter afin d’adapter les messages de prévention au grand public
  • Faire du plaidoyer pour changer la loi concernant l’accès de la société civile aux prisonniers
  • Renforcer le plaidoyer pour l’assouplissement des lois sur les minorités et les délits mineurs
  • Il serait également bon de faire intervenir des organisations expertes sur la radicalisation et la communication liée à cette thématique telles que:
    • RAN: Radicalization Awarness Network (Pays-Bas)
    • ICSR: International Center for Studying Radicalization (Royaume-Uni)
    • RICU (Royaume-Uni)

 Sur la question de l’aspect Curatif:

  • Créer plus de centres de réhabilitation avec un accompagnement psychologique
  • Établir une stratégie à adopter pour les personnes qui sont rentrées des zones de conflits (qui diffère de la stratégie répressive du gouvernement)
  • La société civile doit travailler sur la réintégration des ex-détenus pour prévenir tout sentiment d’abandon

Sur le travail sur la société civile:

  • La société civile est trop souvent élitiste et paraît très éloignée des individus et notamment des jeunes. Il faut donc à tout prix laisser de côté l’ego pour parler d’une seule voix et devenir une alternative crédible au terrorisme. Le travail en réseau doit devenir une priorité. Cela peut se faire par exemple, en organisant un congrès national pour présenter la société civile comme alternative et œuvrer en faveur de la sensibilisation et la prévention. Il faut, pour cela le rendre attractif (y compris dans le choix du nom) d’un point de vue marketing pour attirer les jeunes.
  • La raison pour laquelle Daech attire autant de jeunes est notamment que ce groupe maîtrise les outils de communication. La société civile doit donc renforcer ses capacités à communiquer
  • Donner la parole aux jeunes et les convaincre de leur utilité et du rôle qu’ils peuvent jouer (art, culture, gouvernance, éducation, sport etc.), notamment pour combattre le sentiment d’incapacité et de désœuvrement auquel ils font face
  • Créer une feuille de route commune à toute la société civile et faire de la thématique “radicalisation” une thématique transversale que chacune des associations peut traiter avec son domaine spécifique d’activité

Il est aujourd’hui, plus que temps de se mobiliser. La thématique “Terrorisme” concerne tous les domaines d’activité et doit être combattue par toutes les associations en fonction de leurs domaines d’activités. Ces dernières doivent travailler main dans la main, quelques soient les divergences politiques ou d’opinion. Le terrorisme prend des vies et détruit des familles au quotidiens. La société civile peut représenter une alternative idéale pour revaloriser les jeunes et leur permettre de créer des changements et avoir leur mot à dire.

Acteurs de la société civile, nous sommes l’arme contre le terrorisme!


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