24 سبتمبر 2018 Il y a 6 ans
Les zones côtières en Tunisie abritent les deux tiers de la population totale du pays. Elles présentent une forte densité de population, où l’on trouve la majorité des grandes villes du pays (plus de 1000 habitants/km2 à Tunis et Sfax contre une moyenne nationale de 57 habitants/km2). La région côtière présente une topographie variée et un littoral continental irrégulier de 1445 km s’étendant du nord à l’est et de 450 km de côte insulaire. Les zones humides côtières sont réparties entre 100 000 ha de lagunes, 55 000 ha de Sebkha, 200 ha d’estuaires, 31 000 ha de zones intertidales et 5 100 ha d’oasis côtières.
La côte tunisienne a joué, et continue à jouer, un rôle central dans l’évolution culturelle et économique du pays. L’environnement naturel diversifié offre une vaste gamme de services dans plusieurs secteurs. Il abrite des équipements publics clés (universités, lycées, écoles, hôpitaux, infrastructures de télécommunication et de transport, installations portuaires…). En outre, il soutient la majorité des exploitations industrielles du pays (industrie textile, métallurgique et agroalimentaire). Globalement, la côte abrite plus de 70% des activités économiques, 90% de la capacité totale d’hébergement touristique hôtelière et une grande partie de l’agriculture irriguée dans le pays.
Selon les rapports les plus récents du GIEC, la Tunisie se trouve située dans un hot spot de forte vulnérabilité aux effets des changements climatiques. Notamment, l’élévation du niveau de la mer et les risques d’inondations répétées. Les impacts sont nombreux et commencent à se faire sentir : érosion côtière, perte de la biodiversité côtière et marine, menaces sur les bâtiments et les infrastructures côtières, impacts sur les activités économiques : pêche, tourisme, activités portuaires, etc.
Une étude récente de la Banque mondiale a identifié la Tunisie parmi les 12 premiers pays en développement qui sont à la fois très exposés et vulnérables aux menaces côtières d’élévation du niveau de la mer (ENM). L’étude a révélé qu’environ 5% de la population serait touchée par 1m d’ENM. Le même rapport identifie la Tunisie parmi 7 des pays côtiers les plus vulnérables au monde, en termes de % de la population exposée aux impacts de l’ENM. Dans l’intervalle, une augmentation non linéaire de l’ENM est attendue avec une augmentation de 20 cm d’ici 2040 et une augmentation de 60 cm d’ici 2080 (avec une moyenne de 74 mm). Selon les recherches effectuées par Dasgupta et al (2011)11, les effets combinés de 10% d’intensification des ondes de tempête, en plus de 1 m d’ENM (en ligne avec les prévisions maximales mondiales attendues du rapport du GIEC RE5) aura un impact très significatif en termes de : proportion de la superficie des terres, du PIB, de la superficie des terres urbaines, de la superficie agricole et des zones humides exposées. L’étude a révélé que les zones les plus importantes sur le plan économique (représentant plus de 25% du PIB) sont sujettes à des ondes de tempête en Tunisie12. Une étude postérieure de Milano et al. (2013) a confirmé ces prédictions et a noté que, combinée avec le changement climatique, la pression sur les ressources en eau devrait placer les bassins versants de la Tunisie à des niveaux très élevés de stress hydrique. On s’attend à ce que le rapport entre les prélèvements d’eau annuels et les ressources en eau renouvelables annuelles soit supérieur à 80% d’ici 2050. La vulnérabilité de la Tunisie est aggravée par le fait que sa zone côtière se caractérise par une urbanisation
et une construction en pleine croissance, stimulées par le tourisme et le développement immobilier. Une augmentation des investissements lourds en infrastructure de protection du littoral destinées à réduire l’érosion (comme les épis, les digues, les brise-lames, etc.) a permis de piéger les sédiments et d’accélérer les processus d’érosion. Parallèlement, la surexploitation et l’utilisation inefficace des eaux souterraines, en particulier dans l’agriculture, ont entraîné une intrusion plus active de l’eau de mer et la salinisation des sols. L’agriculture et l’industrie le long des côtes ont également accru la pollution et la dégradation des systèmes lagunaires, des plaines inondables et des zones humides.
Des rapports scientifiques récents incluant les évaluations du GIEC, la Communication Nationale de la Tunisie à la CCNUCC et son étude subséquente sur la vulnérabilité et l’adaptation côtières de la Deuxième Communication Nationale, projettent un climat plus chaud, plus sec et moins prévisible. Une augmentation de la température de 1,1 ° C en 2020, une diminution des précipitations et de la disponibilité de l’eau de 28% en 2050 et des phénomènes météorologiques extrêmes plus intenses et plus fréquents (inondations et sécheresses) au milieu du siècle. De même, l’élévation du niveau de la mer induite par le changement climatique, qui se fait de plus en plus sentir le long de la côte, a fait l’objet de plusieurs études régionales et nationales.
Les travaux menés par le ministère de l’Environnement et de l’Aménagement du Territoire (2001) prévoyaient que le niveau de la mer devrait varier entre 0,38 m et 0,55 m d’ici 2100. Le cinquième rapport d’évaluation du GIEC (AR5) prend en compte le changement climatique hausse peut être significativement plus élevé avec un maximum de 0,98 m possible grâce au siècle prochain avec une hausse de 12 cm dès 202018. Il est généralement admis que niveau de la mer sont l’aspect le plus crucial de la vulnérabilité de la Tunisie aux changements climatiques19 et déjà des cas des niveaux de mer s’élevant jusqu’à quatre fois plus haut que la moyenne mondiale ont été signalés dans certaines zones (en combinaison avec l’affaissement). D’après AAP, 2009.
Les impacts du climat sont susceptibles d’avoir des implications socio-économiques importantes. Par exemple, la deuxième communication nationale tunisienne a indiqué qu’un scénario de 0,5 m d’élévation du niveau de la mer entraînerait une perte de 10 000 hectares de terres agricoles et de 53% des ressources côtières en eau douce. Les dommages totaux au capital productif naturel et en infrastructure sont estimés à 2,6 milliards d’USD (10% du PIB en 2006 !). Les pertes économiques annuelles sont estimées à 126 millions de dollars américains (dont 65% dans le secteur du tourisme) et environ 35 000 pertes d’emplois (1% de la population active totale).
Les plages de sable, qui forment près de 35% du littoral de la Tunisie et qui abritent 80% de l’industrie du tourisme balnéaire, sont particulièrement menacées et seraient amenées à disparaître à un rythme accéléré en raison du changement climatique (par exemple, des plages de sable sur l’île de Djerba sont susceptibles d’être complètement perdues sous une ENM de 1m). La perte d’aménité (amenity value) des plages aura des conséquences énormes sur les revenus du tourisme et des activités connexes. Ceux-ci seront également directement affectés par les dommages aux infrastructures et les changements dans la durée et la qualité des saisons touristiques dépendantes du climat (Steyn & Spencer, 2012 ; Simpson, Gössling, Scott, Hall et Gladin, 2008).
Les écosystèmes des zones humides uniques et importants du pays, qui offrent un large éventail de services dans tous les secteurs, sont à risque élevé en raison du fait qu’ils se produisent au niveau actuel de la mer, ou parfois en dessous. Ils ont fait l’objet d’une exploitation continue et d’une utilisation non durable (par exemple la lagune de Ghar El Melh au nord-ouest du golfe de Tunis). Dans de nombreux endroits, comme dans le nord-est du golfe de Tunis, l’extraction de l’eau et la modification des régimes d’écoulement ont déjà eu un impact considérable sur la biodiversité dans les rivières et les zones humides.
La combinaison des impacts du changement climatique et des impacts des activités anthropiques pourrait être beaucoup plus grande que la somme de ces pressions. Face à cette complexité de problèmes liés aux impacts climatiques, les pouvoirs publics en Tunisie prennent de plus en plus conscience des risques actuels et émergents qui pèsent sur la zone côtière. Ils ont de ce fait agi par le biais de différentes initiatives. En effet, dès l’année 1995, l’Agence de protection et de planification du littoral (APAL) a été créée avec comme responsabilité la protection du littoral en général et du domaine public maritime. Sa mission est de planifier la gestion des zones côtières et d’assurer leur conformité aux règles et normes, d’initier des études et de mener des recherches sur les changements côtiers et l’évolution des écosystèmes côtiers. Le programme national pour la création d’aires marines et côtières protégées vise à établir des zones protégées le long de la côte tunisienne. Bien que des stratégies et des plans d’action pertinents existent, il y a peu d’effets tangibles sur le terrain. La capacité à faire face aux impacts du changement climatique dans les zones côtières est entravée par l’insuffisance de politiques et de législations adaptées au climat pour permettre une approche intégrée de la gestion côtière.
En outre, bien que la Tunisie soit signataire depuis 2008, du protocole relatif à la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) de la Méditerranée23, il manque un effort cohérent pour mettre en œuvre la GIZC. L’approche des pouvoirs publics en la matière, quoique louable, a généralement été réactive et ad hoc avec peu de planification stratégique et préventive. L’accent mis sur les efforts de lutte contre l’érosion a consisté à utiliser des techniques «dures» pour protéger les infrastructures et les terres adjacentes. Les techniques dures sont celles qui impliquent la construction ou la réalisation d’ouvrages solides avec pour objectif principal de «tenir la ligne» de la côte et de se prémunir contre l’évolution de sa configuration géométrique. Pour la plupart, ces mesures ont contribué à consolider la ligne côtière où elles se trouvent, mais de nouveaux problèmes sont apparus tels que défiguration du paysage, l’accumulation d’algues, l’eutrophisation des eaux dans les zones délimitées par les brise-lames, la redistribution inégale des sédiments, l’érosion agressive adjacente à des travaux de protection du littoral, etc.
La Tunisie n’a pas encore la capacité requise pour produire et gérer les informations climatiques pour la prise de décisions en matière de gestion des risques climatiques et d’apporter ainsi des technologies d’adaptation et des meilleures pratiques aux zones et aux parties prenantes les plus vulnérables. Par conséquent, l’intégration du changement climatique dans les principaux outils d’aménagement du territoire et de planification du développement est encore insuffisante.
Tout aussi importante est la nécessité pour la Tunisie de renforcer sa capacité à réduire l’exposition aux risques des investissements critiques (centres de villégiature, maisons, etc.), au point de les détourner/éloigner des zones vulnérables. Des instruments économiques spécifiques et des mécanismes de financement adéquats sont nécessaires pour générer et mieux gérer les possibilités de financement existantes et potentielles afin de soutenir les mesures d’adaptation côtières à l’épreuve du climat. Sans de telles interventions, les difficultés de planification risquent de s’aggraver (deuxième Communication nationale) et l’approche réactive au contrôle de l’érosion se poursuivrait au détriment des zones côtières déjà fragiles et sous forte pression.
La Contribution Déterminée au Niveau National de la Tunisie (NDC) 2015 a prévu des mesures d’adaptation aux changements climatiques prioritaires, notamment pour le littoral. Celles-ci portent essentiellement sur la réhabilitation et la lutte contre l’érosion côtière, le réaménagement et la délocalisation des zones industrielles côtières, la réhabilitation et la protection des infrastructures existantes contre les risques d’impacts climatiques et l’implantation des fermes et d’infrastructures aquacoles. Le besoin de financement de ces actions est estimé à 556 Millions de dollars US sur la période 2015-2030.
L’accroissement de la résilience du littoral au changement du climat passerait par trois prérequis essentiels. Premièrement, l’adaptation de la politique et des instruments de l’aménagement du territoire à même de réorienter les activités économiques basées sur le littoral vers d’autres espaces moins vulnérables. Deuxièmement, le développement et le renforcement des infrastructures existantes afin de les protéger un tant soit peu des effets attendus. Troisièmement, le renforcement de la résilience des activités économiques fortement dépendantes des zones côtières (notamment le tourisme, la pêche et l’activité portuaire). La réalisation de ces trois prérequis est tributaire à son tour des approches de gouvernance : prise de décision, contrôle, participation, décentralisation… Elle est également tributaire des instruments économiques devant donner les signaux aux agents économiques afin de les amener à changer leurs comportements et leurs choix d’investir. Ceci peut concerner la délocalisation, le renforcement de la résilience physique des infrastructures et des établissements, les modes d’occupation, les modes de production, etc.
La mission objet de ces termes de référence consistera dans l’évaluation économique et institutionnelle des aspects liés à l’adaptation au changement climatique dans les zones côtières. Plus spécifiquement, elle devra permettre d’apporter un cadrage économique, en termes d’évaluation des coûts et avantages de l’adaptation, ainsi que ses impacts sur la croissance économique et sur l’emploi. Sur le plan institutionnel, la mission devra apporter un éclairage et des recommandations de mesures spécifiques en matière d’intégration dans les politiques publiques et dans le système de planification nationale des questions d’adaptation des zones côtières au changement climatique. Elle devra enfin, évaluer le rôle et la place du secteur privé dans la mise en œuvre des mesures d’adaptation et de résilience climatique du littoral.
L’objectif de la mission est l’évaluation économique et institutionnelle des aspects liés à l’adaptation du littoral tunisien au changement climatique. Plus spécifiquement, il s’agira de fournir au décideur public les éléments de cadrage essentiels aux plans économique et institutionnel à même d’orienter les choix de politiques publiques vers une plus grande prise en compte des impacts et des risques attendus des changements climatiques sur l’économie et les ressources des zones côtières tunisiennes.
En outre, les résultats de la mission serviront de base à l’établissement d’un programme d’investissement approprié et à l’adoption des instruments économiques et financiers adéquats, dans le but d’accroitre la résilience des zones côtières au changement climatique.
Il est prévu que la mission d’étude comporte trois parties. Une première partie de cadrage ; une deuxième partie d’évaluation économique et une troisième partie de recommandations.
Une description des tâches et des questions à adresser est donnée ci-après à titre indicatif. Le consultant présentera dans son offre technique une description claire et détaillée de la méthodologie et de la consistance de sa prestation.
III.1. Première partie. Cadrage économique et institutionnel
Sur la base d’une revue documentaire sur les aspects en relation avec l’objet de la mission. (Une liste bibliographique indicative est donnée en annexe). Il s’agira notamment, des aspects suivants :
III.2. Deuxième partie. Evaluation économique
Basant sur les résultats de la première partie et en s’appuyant sur les études récentes en la matière, dans cette partie de la mission il est attendu du consultant une analyse coûts bénéfices de l’adaptation des zones côtières au changement climatique. L’horizon temporal à considérer est 2030.
A titre indicatif, quelques principes peuvent guider l’évaluation économique.
III.3. Troisième partie. Recommandations pour les décideurs
A la lumière des évaluations précédentes, il s’agira de définir les mesures de politiques publiques requises pour une plus grande et meilleure prise en compte des changements climatiques dans la planification et la gestion des zones côtières. Ces mesures peuvent être d’ordre législatif et réglementaire, économique, fiscal, de planification et d’aménagement du territoire, de réforme institutionnelle, intégration dans le système de planification nationale et dans les stratégies sectorielles. Enfin des recommandations relatives au renforcement des capacités et de mobilisation des ressources financières (locales et internationales). Les mesures à recommander seraient classées selon leur degré de pertinence au regard des impacts climatiques et des bénéfices économiques escomptés des actions d’adaptation et de résilience.
Trois rendus sont attendus de la mission, selon les indications suivantes :
La durée totale de la mission est estimée à 8 mois, à compter de la date de signature du contrat de service. Un planning détaillé de la mission sera fourni par le soumissionnaire dans son offre technique. Une version définitive du plan de travail sera validée avec le consultant sélectionné au démarrage de la mission.
Il a été estimé que le niveau d’effort nécessaire à l’accomplissement de la mission est de 120 personnejours (pj), répartis par expert comme suit :
L’évaluation des Offres financières se fera comme suit :
Seules les propositions financières des candidatures retenues suite à l’évaluation technique avec un minimum de 70/100 points seront considérées dans l’évaluation financière.
La Proposition financière la moins disante (Fm) obtient un score financier (Sf) de 100 points. Les scores financiers (Sf) des autres offres sont établis de la manière suivante :
Sƒ = 100 x Fm/F
Sƒ étant le score financier, Fm la proposition la moins disante et F le montant de la proposition considérée.
Les poids respectifs attribués aux propositions technique et financière sont respectivement de 70% et 30%.
La note finale S (correspondant au score technique et financier combiné) est calculée comme suit :
S = St x 70% + Sf x 30%
St : étant le score technique
La note finale correspondra à la somme des 2 notes obtenues pour les critères considérés. A l’issue de l’évaluation, les soumissionnaires seront classés par ordre décroissant de valeur en fonction de la note finale obtenue.
Le soumissionnaire ayant obtenu le score technique et financier combiné (S) le plus élevé sera retenu pour l’exécution de la mission
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